Affichage des articles dont le libellé est Sociologie. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Sociologie. Afficher tous les articles

vendredi 1 février 2019

Zoopolis : Une théorie politique des droits des animaux, de Sue Donaldson et Will Kymlicka


Auteur·trice·s : Sue Donaldson et Will Kymlicka, et Corinne Pelluchon pour la post-face
Traducteur·trice·s : Pierre Madelin
Éditeur·trice : Alma
Collection : Essai/Philosophie
Pages : 374
Date de parution : 13 octobre 2016
Genre·s : Essai, philosophie, sociologie

Synopsis : Comment faire coexister l’espèce humaine et l’espèce animale au sein d’une même société en tenant compte leurs intérêts respectifs ? Défendre les animaux en se bornant à énoncer des interdits ne permet pas de promouvoir une société plus juste à leur égard. Les théories classiques servent à dénoncer les violences qu’ils subissent mais, dans les faits, les animaux sont traités comme des objets. Will Kymlicka et Sue Donaldson retracent le chemin accompli depuis quarante ans et vont plus loin. Ils proposent la première théorie relationnelle des droits des animaux, définissant les obligations concrètes que nous avons à leur égard. Les deux chercheurs distinguent trois classes d’animaux : les animaux domestiques, les animaux liminaux et les animaux sauvages. À chacune de ces classes, ils appliquent des catégories morales et politiques issues de la théorie de la citoyenneté. Ils établissent notamment une distinction entre les droits universels de base, qui servent à protéger tous les êtres sensibles, et les droits différenciés, qui dépendent du statut particulier de chaque groupe (citoyen, résident, membre d’une communauté souveraine). Se fondant sur les théories contemporaines de la justice et la notion de vulnérabilité, Zoopolis renouvelle profondément la question animale. Il est temps de ne plus traiter les animaux comme de simples moyens au service de nos fins.

Mon avis : Cet essai dédié à la théorie politique des droits des animaux interroge leur place dans notre société, leurs droits et leurs responsabilités. Découpé en deux parties, il aborde, dans un premier temps, les droits universels de base pour les animaux et, dans une seconde partie, la théorie de la citoyenneté. 

Il s'agit d'un travail sur le long terme, effectué par Sue Donaldson, chercheuse indépendante, et Will Kymlicka, professeur de philosophie politique, qui met en lumière la place que nous pourrions accorder aux animaux. Grâce aux recherches, nous savons désormais que les animaux sont des êtres sentients (c'est-à-dire qu'ils ont "la capacité à éprouver du plaisir, de la douleur et de la souffrance de manière objective et singulière et ont des intérêts à défendre pour eux-mêmes", comme le rappelle Corinne Pelluchon dans la post-face). En partant de cette connaissance, nous pouvons nous demander pourquoi ils sont objectifiés.

Les auteur·rice·s de cet ouvrage appuient le fait que tous les animaux devraient, en premier lieu, posséder des droits inviolables (ne pas être tué, torturé ou réduit en esclavage), et ce, peu importe le degré de complexité cognitive. 

Dans la seconde partie, iels distinguent les animaux en trois classes : les domestiques, les liminaux (c'est-à-dire qu'ils vivent parmi nous, dans nos villes ou en périphérie, sans pour autant être domestiqués ni sauvages) et les sauvages. Sue Donaldson et Will Kymlicka défendent l'idée d'accorder le statut de citoyen aux animaux domestiques, engagés de fait dans des relations morales avec les êtres humains, et les raisons pour lesquelles les animaux liminaux et sauvages devraient avoir un statut différent (tout en conservant des droits inviolables). 

Ce sont des arguments solides qui ne sont pas basés sur l'affect, et qui m'ont personnellement convaincue, alors que j'étais dubitative vis-à-vis de la citoyenneté pour les animaux, au départ. Il n'y a pas volonté d'accuser qui que ce soit, et cet ouvrage s'adresse à absolument tout le monde. Je me considère comme végane, antispéciste et militante pour la cause animale, et je suis ravie d'avoir lu cet essai qui m'a permis d'étayer mon point de vue. Je l'ai lu dans le cadre d'un club littéraire antispéciste, et que je suis l'une des personnes qui va présenter le livre, et j'ai donc dû prendre de nombreuses notes, qui me resserviront probablement pour moi-même. 

Le gros bémol du livre, c'est qu'il y a de nombreuses répétitions - ce qui semble être souvent le cas dans ce genre d'essai, comme un moyen de s'assurer que le/la lecteur·rice ne passe pas à côté du message -, mais cette redondance était parfois un peu ennuyante. Iels donnent de très nombreux exemples, certes pertinents, mais qui ne font qu'allonger la lecture. Le même message aurait pu être plus court, et donc moins décourageant pour certaines personnes.

Contrairement à ce que je pensais de prime abord, cet ouvrage reste accessible, même s'il faut rester assez concentré·e et que la lecture prend du temps. Il est très théorique (surtout dans la première partie), si bien que j'avais parfois envie de décrocher, mais je ne regrette absolument pas cette lecture qui fut enrichissante intellectuellement, d'autant plus que je n'étais pas toujours d'accord avec les auteur·rice·s, cela m'a obligée à approfondir mon point de vue sur certains sujets. Je vous encourage vivement à vous pencher dessus, que vous ayez déjà réfléchi aux droits des animaux ou non - et particulièrement si ce n'est pas le cas.  

lundi 29 octobre 2018

Beauté fatale : Les nouveaux visages d'une aliénation féminine, de Mona Chollet


Auteur·trice·s : Mona Chollet
Éditeur·trice : La Découverte
Collection : Poche
Pages : 289
Date de parution : 2015
Genre·s : Essai, sociologie

Synopsis : Soutiens-gorge rembourrés pour fillettes, obsession de la minceur, banalisation de la chirurgie esthétique, prescription insistante du port de la jupe comme symbole de libération : la « tyrannie du look » affirme aujourd'hui son emprise pour imposer la féminité la plus stéréotypée. Décortiquant presse féminine, discours publicitaires, blogs, séries télévisées, témoignages de mannequins et enquêtes sociologiques, Mona Chollet montre dans ce livre comment les industries du « complexe mode-beauté» travaillent à maintenir, sur un mode insidieux et séduisant, la logique sexiste au coeur de la sphère culturelle.

Sous le prétendu culte de la beauté prospère une haine de soi et de son corps, entretenue par le matraquage de normes inatteignables. Un processus d'autodévalorisation qui alimente une anxiété constante au sujet du physique en même temps qu'il condamne les femmes à ne pas savoir exister autrement que par la séduction, les enfermant dans un état de subordination permanente. En ce sens, la question du corps pourrait bien constituer la clé d'une avancée des droits des femmes sur tous les autres plans, de la lutte contre les violences à celle contre les inégalités au travail.


Mon avis : Dans cet ouvrage, Mona Chollet s'attaque aux injonctions qui pèsent lourdement sur les épaules des femmes pour qu'elles soient belles et féminines, et qui sont amenés par les discours de la mode, du mannequinat, du cinéma et de la presse (notamment celle intitulée "presse féminine"). 

Sur près de 300 pages, l'autrice décrypte les différentes injonctions (il faut être mince, blanche, jeune, idéalement blonde, parfaitement épilée, toujours bien apprêtée et maquillée, etc.) auxquelles les femmes Occidentales doivent faire face (et se plier). Pour parvenir à cet idéal de beauté, il faut consommer, toujours plus. 

Bien qu'ayant l'impression d'être plutôt "avancée" dans mes réflexions autour du féminisme (je lis des articles et livres sur le sujet depuis plusieurs années maintenant), l'essayiste a pu m'apprendre des choses ou pousser plus loin certaines de mes idées (par exemple, je n'avais jusque-là pas vraiment pensé à ce que les femmes devenues stars pouvaient vivre), et les chapitres sur les critères de beauté blanc, sur l'anorexie et la chirurgie ont été particulièrement instructifs pour moi. 

C'est avec beaucoup de colère que j'ai refermé ce livre. Mona Chollet ne mâche pas ses mots - je la trouve même parfois très virulente envers d'autres femmes - et dépeint un tableau très sombre mais réaliste. Il est grand temps que les choses changent, et, même s'il est compliqué de déconstruire ce que la société nous a fait intégrer, Beauté fatale va sans aucun doute m'aider dans cette démarche. 

Un livre glaçant, révoltant, mais indispensable !

16/20

jeudi 13 septembre 2018

Riche : Pourquoi pas toi ?, de Marion Montaigne, Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon


Auteur·rice·s : Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot
Illustrateur·trice·s : Marion Montaigne
Scénariste·s : Marion Montaigne
Éditeur·trice : Dargaud
Pages : 133
Date de parution : 2013
Genre·s : Bande-dessinée, essai, sociologie, humoristique

Synopsis : Riche, pourquoi pas toi ? est une enquête fiction sur l'argent signée Marion Montaigne. L'auteur s'appuie sur les écrits de Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, deux authentiques sociologues « spécialistes des riches »...

Riche, pourquoi pas toi ? est un one shot qui raconte l'histoire de Philippe Brocolis, heureux gagnant de la cagnotte du Loto. Avant, les choses étaient simples : pour Philippe, être riche, c'était – eh oui ! – avoir de l'argent ! Pourtant, après avoir reçu son gain, il s'aperçoit que ce n'est pas si simple à définir, la richesse. Avec l'aide des sociologues Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, la famille part à la conquête d'un monde qui lui est totalement étranger, celui de la bourgeoisie.

Riche, pourquoi pas toi ? est une histoire complète, une BD documentaire et humoristique sur l'argent et les riches.

Mon avis : J'ai découvert Marion Montaigne grâce à l'adaptation en série télévisée des Tu mourras moins bête mais tu mourras quand même, sur Arte, que j'avais beaucoup aimé. Cette fois, la bédéiste s'attaque (au sens figuré) aux riches... Aidée des sociologues Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, spécialistes du sujet, Marion Montaigne décrypte les riches, les différentes façons de l'être et leur rôle dans la société... 

Nous allons ainsi faire la connaissance de Philippe Brocolis, sa femme et son fils, une famille prolétaire à qui les deux sociologues veulent apprendre des choses sur leur spécialité... Ainsi, nous apprenons avec cette famille comment les classes existent encore, les différents types de riches (ceux qui le sont à la naissance, les nouveaux riches, les bourgeois, etc.) 

C'est une vulgarisation de l'économie et de son fonctionnement, qui m'a permis de mieux comprendre certaines choses. J'ai trouvé cette bande-dessinée intéressante parce que le sujet est bien amené. À aucun moment je n'ai trouvé ça lourd, puisqu'il y a beaucoup d'humour de distillé entre les pages. Les planches sont parfois hilarantes mais reflètent toujours une réalité. 

Marion Montaigne a parfaitement su jongler entre l'information et l'humour, et les nombreuses références (à Marx, par exemple). Ce livre balaie toutes les questions sur la richesse et l'économie qu'on pourrait se poser. 

C'est un excellent moment que j'ai passé tout en apprenant des choses. 

16/20